Dans une société où les aliments transformés, les excès et l’obésité font des ravages, la publication du plus récent guide alimentaire brésilien se présente comme l’occasion d’amorcer une réfl exion sur notre alimentation. En quoi révolutionne-t-il le guide alimentaire tel que nous le connaissons?
Le guide alimentaire brésilien (Guia Alimentar para a População Brasileira) formule des recommandations sur quoi manger et également comment manger. Que vise-t-on en tentant d’apprendre à la population «comment bien manger» aussi bien que «quoi manger» ? À favoriser l’autonomie, à inculquer de meilleures habitudes alimentaires et, ultimement, à prévenir la maladie et promouvoir la santé en général. L’approche du guide alimentaire brésilien est basée sur les données de consommation de la population du Brésil qui démontrent clairement que ceux qui cuisinent et qui mangent plus d’aliments frais et minimalement transformés ont la meilleure alimentation. En résumé, le guide alimentaire brésilien se veut un outil pour encourager un nouvel état d’esprit quant à l’alimentation.
LES 10 ÉTAPES POUR UNE SAINE ALIMENTATION
Voici un résumé des 10 recommandations principales proposées dans le guide alimentaire brésilien.
1. Faire des aliments frais ou minimalement transformés la base de l’alimentation.
2. Utiliser les huiles, le beurre, le sel et le sucre avec modération pour cuisiner.
3. Limiter la consommation d’aliments transformés, comme le fromage, le pain et les fruits conservés dans le sirop.
4. Éviter la consommation de produits ultratransformés, comme les boissons gazeuses, les céréales sucrées, les grignotines et les repas congelés.
5. Manger régulièrement et avec attention, dans des endroits appropriés et, lorsque possible, en bonne compagnie.
6. Faire l’épicerie dans des endroits où l’on vend une grande variété d’aliments frais ou peu transformés.
7. Développer, exercer et partager ses habiletés culinaires.
8. Planifier son temps de façon à donner à l’alimentation la place qu’elle mérite.
9. Lorsqu’on ne mange pas à la maison, préférer des endroits où l’on prépare des plats fraîchement préparés et éviter les chaînes de restauration rapide.
10. Être critique envers l’information, les messages et les recommandations alimentaires diffusés à travers la publicité.
OPINION D’EXPERT
Jean-Claude Moubarac Professeur en nutrition internationale au Département de nutrition de l’Université de Montréal et collaborateur à l’élaboration du guide alimentaire brésilien dans le cadre de ses études postdoctorales à l’Université de São Paulo.
Aujourd’hui, presque tout ce que l’on consomme a été transformé d’une manière ou d’une autre. «En se basant sur une nouvelle classification des aliments en fonction de leur niveau de transformation et de leur qualité, le guide brésilien tient compte de notre réalité d’aujourd’hui», souligne Jean-Claude Moubarac. Il ajoute qu’en proposant une approche réaliste axée sur le plaisir de manger des repas complets, le guide vise à changer le comportement du consommateur afin qu’il fasse partie des solutions et qu’il puisse, avec ses choix, changer l’offre alimentaire.
Points forts
º Le guide brésilien se base sur des données scientifiques et des données réelles de consommation. Même si elles sont exprimées de manière qualitative, les recommandations sont basées sur des données quantitatives.
º Il tient compte du niveau de transformation des aliments.
º Les recommandations sont très simples.
º Lorsque l’on mange de bons aliments dans un contexte approprié, on respecte mieux notre satiété et on limite les risques d’excès.
º Les recommandations vont au-delà des aliments: on parle du contexte de consommation,
lequel influence directement la qualité de notre alimentation.
º Cette approche encourage les gens à faire des choix éclairés par eux-mêmes et à développer leur autonomie alimentaire.
º On se rapproche de recommandations universelles qui peuvent s’appliquer à tout être humain, peu importe sa culture.
«Le guide alimentaire brésilien peut être appliqué à plusieurs pays parce que la réalité des Brésiliens ressemble beaucoup à la nôtre: on cuisine de moins en moins, on prend moins le temps de manger et on mange de plus en plus d’aliments prêts-à-manger de type ultra-transformés.» – Jean-Claude Moubarac
Pourquoi le Guide alimentaire canadien colle-t-il moins à notre réalité que la version brésilienne?
Contrairement au guide brésilien qui propose des recommandations générales, le Guide alimentaire canadien prescrit des portions en fonction des nutriments. Le principal problème: les gens comprennent très mal les portions. En effet, cette approche ne s’appuie pas sur des données scientifiques et elle est très estimative. «Le guide brésilien ne veut pas prescrire de portions, car on sait que les besoins sont variables d’une personne à l’autre et d’une journée à l’autre en fonction de différents facteurs. Il est faux de penser que l’on a besoin d’une portion précise chaque jour», explique Jean-Claude Moubarac. Celui-ci précise que ce genre de prescription devrait se faire en milieu clinique selon les besoins précis d’une personne, pas dans un guide adressé à la population générale. Par ailleurs, les quatre catégories alimentaires ne sont plus pertinentes parce que l’on ne donne aucune recommandation claire sur les aliments transformés. On met par exemple les fruits frais et les jus de fruits dans la catégorie des fruits et légumes: or, une portion de fruit n’a pas la même valeur nutritionnelle qu’une portion de jus de fruits. Le professeur montréalais croit qu’avec le Guide alimentaire canadien, les gens sont un peu laissés à eux-mêmes.
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